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Les 50 ans de la bibliothèque universitaire de Pont de Bois

En octobre 1974, littéraires et juristes découvrent l’ensemble universitaire des lettres et du droit créé par l’architecte Pierre Vago. En cette première rentrée à Villeneuve d’Ascq, les locaux s’élèvent, esseulés, sur une vaste plaine boueuse : le quartier du Pont de Bois —qui doit l’accompagner— n’est pas encore construit.

À l’entrée de l’université, un bâtiment surprend : la bibliothèque, que l’architecte a voulu « complètement lisse, unie et calme ». Si cette construction singulière s’harmonise autour du forum avec les autres bâtiments dessinés par Pierre Vago, la bibliothèque se distingue par sa forme cubique, tandis que les autres bâtiments sont de plan rectangulaire, ainsi que par sa façade pleine en carreaux de céramiques beiges, tranchant avec les bâtiments de cours en béton nu abondamment vitrés. Monolithique, la bibliothèque apparait comme une masse suspendue au-dessus des baies vitrées disposées en retrait au niveau du forum.

Lorsque la bibliothèque interuniversitaire ouvre ses portes le 4 novembre 1974, premier jour des cours à Lille 3, littéraires et juristes peuvent profiter de généreux espaces formés par des plateaux sur deux étages, entourant un patio qui apporte la lumière naturelle au cœur du bâtiment. Si la bibliothèque est vaste, elle devait l’être plus encore car, aux 16.000 m2 réalisés, deux bâtiments supplémentaires ajoutaient 9.500 m: initialement prévus pour s’articuler autour du silo à livres, ces deux autres « carrés » ne seront jamais réalisés, faute de budget. Un seul bâtiment est donc construit, regroupant l’ensemble des services prévus pour trois constructions, les salles de lecture étant réparties sur trois niveaux « publics » —accessibles aux lecteurs selon leur année d’étude—, tandis qu’un bardage en tôles vient recouvrir « temporairement » le silo à livres. Toujours en raison de crédits insuffisants, les finitions intérieures sont réduites au minimum. Ainsi, le béton reste-t-il nu dans les salles, alors qu’il est prévu à l'origine d’habiller les parois et les plafonds par du bois apparent.

Pierre Vago conçoit les espaces de la bibliothèque selon un programme « intangible » émis par la Direction des bibliothèques et de la lecture publique, qui indique le nombre de salles, de bureaux, ainsi que celui des mètres carrés nécessaires à chacun. À ce programme est joint une note contenant des prescriptions générales sur l’éclairage, la sécurité, la hauteur des rayonnages, etc. Si la Direction des bibliothèques discute certains points du projet présenté par l’architecte, ce dernier sait être convaincant pour le faire accepter, bénéficiant de l’aura d’avoir réalisé la bibliothèque de l’université de Bonn, en collaboration avec Fritz Bornemann. Les plans intérieurs sont affinés au fil des échanges qui précèdent la construction, en particulier grâce au programme pédagogique réalisé et mis à jour par les bibliothécaires de Lille.

Durant ses 48 années d’usage, la bibliothèque connait peu de changements, malgré plusieurs projets d’extension portés par l’université. Quelques travaux de sécurité, d’étanchéité du toit-terrasse, de cloisonnements pour la création de services ou de bureaux, permettent certes à la bibliothèque de fonctionner chaque année pour des milliers d’usagers, mais dans des conditions devenant toujours plus précaires. Un temps, on juge même préférable de raser cet édifice iconique pour en bâtir un nouveau que d’en assurer la rénovation. Fermée à l’été 2022, la bibliothèque bénéficie aujourd’hui d’une réhabilitation d’envergure effectuée par l’Agence Carta-Reichen et Robert Associés, laquelle peut tirer parti d’un espace qu’elle juge très bien conçu à l’origine, l’architecture de Pierre Vago offrant une grande flexibilité pour penser un aménagement correspondant à de nouveaux besoins.

Le 7 novembre 2024, soit presque 50 ans jour pour jour après son ouverture à la communauté universitaire, sera dévoilée la nouvelle identité de la bibliothèque rénovée. Un nouveau chapitre de son histoire peut dès lors commencer à s’écrire…

 

Article écrit par Christophe Hugot, responsable de la Bibliothèque des sciences de l'Antiquité - Faculté des Humanités, Université de Lille